Trente écoles pour un forum de pratiques pédagogiques

La circonscription de Douai Cuincy est en pleine préparation d’un forum de pratiques pédagogiques. Il s’agira d’un grand rassemblement des 280 enseignants, où les écoles vont présenter à d’autres écoles des activités qu’elles ont repérées entre toutes.

Lieu d’accueil symbole du travail fructueux entre le premier et le second degré, le collège d’Auby va être bien animé en ce mercredi après-midi 18 octobre. En effet, tous les enseignants du premier degré de la circonscription vont s’y retrouver pour trois heures de formation. Vingt-six ateliers coanimés par les enseignants, une exposition de travaux d’élèves et des dizaines de fiches de présentation de pratiques seront présentés. Avec un objectif : le partage pour apprendre ensemble.

« C’est vraiment de la formation ? »
Certains enseignants ont posé cette question, et ils ont raison. Dans la vision commune, on va en formation pour « être formé », pour recevoir des savoirs, des indications de ce qu’il faut faire ou ne pas faire en classe. Pour avoir des documents, clairs, guidants. Il y a quelque chose de rassurant dans cette vision de la formation. Elle apporte des réponses. Et des réponses, on en a tous besoin, au moins un temps. Pourtant, les études sur le développement professionnel des enseignants montrent bien que ce qui influe le plus, c’est d’être partie prenante de sa formation et de ne pas la subir. Une autre étude montre qu’être investi dans sa formation aide à se sentir compétent dans son travail. Et se sentir compétent, ça aide tous les jours à se sentir plus fort, plus créatif, plus à l’aise, quand on se retrouve, seul, dans sa classe.

« On a besoin de concret »
Si l’on a besoin de se sentir compétent dans son travail, on a aussi besoin d’éléments concrets. L’an dernier, les enseignants l’ont beaucoup dit dans les questionnaires qui suivaient les temps de formations. Le concret, il est particulièrement présent dans les témoignages des collègues, dans le partage des pourquoi et du comment on a mis en place telle activité d’apprentissage, avec quels bénéfices et quelles difficultés. D’où l’idée qui a germé : organiser un forum où chaque école pourrait présenter à d’autres ce qui a été expérimenté et échanger avec les participants.

« Je partage, nous apprenons ? »
Les enseignants vont présenter au cours des ateliers un projet qu’ils ont mis en place : ceintures de réussite comme outil d’évaluation positive, cahier de vie numérique, projet verger et potager, école bilangue anglais allemand, construction des règles de vie, classe découverte comme projet coopératif entre CM2 et Ulis, quart d’heure philo en maternelle, et bien d’autres. La présentation sera suivie d’échanges avec les participants. Entre deux présentations, les enseignants découvriront des travaux d’élèves et des outils de présentations de diverses activités.

Qu’en retireront-ils ? L’objectif d’apprendre tous ensemble sera-t-il tenu ? La question sera posée aux participants et aux animateurs après le forum. Puisque s’impliquer dans sa formation, c’est aussi l’évaluer pour l’améliorer.

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Edito de rentrée – Apprendre ensemble

Tout a commencé en 2016, avec la venue à l’école d’Esquerchin de Danielle et Marcel Thorel (1). De cette rencontre, naquit l’idée de créer une classe à pratiques coopératives. Une enseignante, Corinne Piela, mettrait en place le dispositif des entretiens, des exposés d’élèves à partir desquels se déclinent orthographe, grammaire, lecture, mathématiques et tout ce que le thème suscite. Danielle et Marcel Thorel viendraient régulièrement dans la classe pour aider à la mise en place.

En ce mois de mai 2017, les élèves, sérieux et joyeux, sont pressés de montrer ce qui s’est passé tout au long de l’année. Et la séance a lieu, ritualisée, avec le planning des entretiens, du maitre du temps et du maitre de la parole. Les trois présentations et les questions dureront vingt minutes. Romane présente les photos des fruits et des légumes de son potager, Timéo montre le dessin qu’il a fait à l’atelier de peinture au musée de la Chartreuse à Douai à partir du tableau « La fille du pêcheur» peint en 1876 par Jules Breton. Et Agathe présente un livre sur la République.
Les trois élèves s’expriment très clairement, autant pour présenter que pour questionner ou répondre aux questions. Les élèves vont ensuite chercher quelques phrases pour synthétiser ce qu’ils ont entendu, retenu de chaque présentation, seuls puis en commun. « Aujourd’hui, Romane a parlé de son potager. Elle a planté des fruits savoureux et des légumes juteux. » Les phrases feront l’objet d’une analyse grammaticale.

Acteurs et auteurs
Que retirer de cette pratique au long des mois ? Corinne Piela remarque que l’aisance des élèves est venue au fil des entretiens et qu’elle-même s’attache de plus en plus au questionnement, avec l’objectif désormais de conceptualiser les notions qui ressortent des entretiens, et de les classer et les relier : « Les repères se construisent au fur et à mesure, repères géographiques, historiques, ou scientifiques avec les classifications. Les thématiques se rattachent aux apprentissages, en allers retours : ce va-et-vient est important pour installer durablement les choses. » L’enfant est acteur, lorsqu’il présente. Mais il est aussi auteur, et cela, c’est très nouveau. L’idée de partage est très visible, jusqu’à se prolonger vers les parents, puisque les présentations, remises en forme par l’enseignante, sont à leur disposition via l’espace numérique de travail.
Et les élèves, qu’en retirent-ils ? « J’ai appris des choses que je ne connaissais, comme le peintre tout à l’heure. » (François). « Moi j’ai appris à faire des expériences, avec du lait, des colorants, du sel. » (Elliot)« Ça m’a donné envie de faire la même chose, comme le jardinage. » « J’aime bien présenter, et avoir les rôles, pour l’organisation, le temps et la parole. » (Victoire) « J’avais un peu peur quand j’ai présenté, mais très vite j’ai eu confiance en moi et dans les autres. On se dit qu’on est capable de faire quelque chose, les amis encouragent. » (Mattéo)

Partage, apprentissages et confiance
En cette rentrée, Corinne Piela le sait, elle va continuer, avec les mêmes élèves de CE1 passant en CE2. Elle travaillera davantage les traces écrites concernant les repères et également la construction régulière, à partir de cartes muettes, sur la frise et la classification scientifique.
A tous, parents, élèves, enseignants et équipe de circonscription, on peut souhaiter une année qui soit, comme dans cette classe, placée sous le sceau du partage, des apprentissages échangés et de la confiance que l’on sait pouvoir placer dans les autres.

Bonne rentrée à tous !

(1) Danielle et Marcel Thorel ont fait partie de l’équipe qui a créé en 2001 une école Freinet à Mons-en-Baroeul, près de Lille. Nous suivons chaque année ce projet.

https://douaicuincy.etab.ac-lille.fr/2016/11/13/freinet-aujourdhui-sur-la-route-des-classes-cooperatives/

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Freinet aujourd’hui, sur la route des classes coopératives

Célestin Freinet : avec le nom de ce pédagogue viennent à l’esprit le texte libre, la correspondance entre écoles, le plan de travail et les classes coopératives. Les techniques Freinet sont plus que jamais vivantes. Rencontre avec Danielle et Marcel Thorel qui portent haut les couleurs de la coopération, jusqu’à l’école d’Esquerchin.

Danielle et Marcel Thorel

Danielle et Marcel Thorel

Danielle et Marcel Thorel ont fait partie de l’équipe qui a créé en 2001 une école de type Freinet dans le système public, à Mons-en-Baroeul, près de Lille. Pendant cinq ans, une équipe de dix chercheurs du laboratoire Théodile de Lille 3 a suivi cette école de neuf classes et son équipe toute neuve. Le pari lancé était, que de la mise au travail des élèves, selon des modalités particulières, découlerait un meilleur climat scolaire et de meilleurs résultats. Un pari réussi à bien des égards. Entretien du matin et plan de travail : ce sont deux dispositifs issus de cette expérience que Danielle et Marcel Thorel sont venus présenter à l’équipe pédagogique d’Esquerchin, intéressée par des pratiques de coopération en classe.

Les nouvelles du matin

Sur la table, un classeur avec des exemplaires du journal quotidien de la classe de CM1 de Marcel Thorel à Mons-en-Baroeul. L’enseignant se souvient. La journée commençait par «  l’entretien du matin ». Les élèves qui voulaient intervenir pour présenter une chose qu’ils avaient vue, entendue ou vécue et qui les avait intéressés, pouvaient s’inscrire à l’avance sur un tableau : pas plus de cinq élève par jour et pas plus de six minutes par présentation.Un enfant dirigeait l’entretien, prenait et donnait la parole à la classe pour des questions. L’entretien était pris en note sur ordinateur par l’enseignant, puis cette page quotidienne du journal était publiée, distribuée à chaque enfant le lendemain matin et lue en collectif. Dans ce journal, les élèves y étaient reconnus, photographiés souvent. « C’était aussi une manière pour l’enfant de tisser des liens entre les évènements présentés, de penser à rapporter un ticket de foot pour en parler le lendemain, de prendre de la distance avec son quotidien », précisa Marcel Thorel.

Réunion de l'équipe d'Esquerchin autour de Danielle et Marcel Thorel

Réunion de l’équipe d’Esquerchin autour de Danielle et Marcel Thorel

Cet entretien était aussi une éducation à la prise de parole. Deux sabliers cadraient le temps et les passages. « Il faut que le dispositif soit très sérieux, permette de veiller à ce que les interventions ne touchent pas aux choses intimes. Si les élèves posent des questions anecdotiques, l’enseignant intervient pour élever le débat parfois, pour conduire à plus d’abstraction. Pour les plus petits ou les plus réservés, il est préférable de ne pas forcer. » De cette manière, l’oral est entré peu à peu dans la classe, qui permettait de structurer sa pensée en trois minutes, dans un cadre protecteur. Au début, il était nécessaire de reformuler, mais à raison de cinq séances par semaine, les progrès étaient visibles. Ces prises de parole permettaient de mieux connaitre les représentations mentales des enfants sur certains sujets, pour partir d’elles et les faire évoluer. C’était une manière aussi d’apprendre les uns des autres sur des vécus différents, et de faire réfléchir à partir de ces vécus, soit pour apporter de la complexité, soit pour y mettre de l’ordre, soit pour conceptualiser : une inondation, c’était la notion de vases communicants ; le concert d’une chanteuse, c’était l’occasion d’une discussion sur les raisons pour lesquelles on s’identifie à une vedette.

Le plan de travail

Ce qui a été mis en place pour progresser, c’est à la fois du collectif et du travail individuel.

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Un autre dispositif très utilisé dans les techniques Freinet est le plan de travail individuel. A Mons-en-Baroeul, il l’était également. L’emploi du temps de la semaine était découpé en temps collectifs et en temps de travail individuel. Dans le CP de Danielle Thorel, trois plages d’une demi-heure de travail individuel étaient placées dans la journée. Les temps collectifs sont ainsi décollés du travail individuel qui suivra. Cela permet de sortir du travail identique pour tous, des exercices standardisés trop faciles pour certains, trop difficiles pour d’autres. « Ce plan de travail est préparé par l’enseignant, qui prévoit des fiches de travail, de la lecture silencieuse, des mathématiques, du texte libre. Le travail, individualisé, est disposé dans des tiroirs numérotés. Mais au début, tout le monde fait la même chose. Puis, le travail demandé se diversifie selon le niveau de chaque élève. Il faut peu à peu apprendre à travailler seul, à chercher les bonnes informations, rester concentré, inscrire les données au bon endroit sur sa feuille. », indiqua Danielle Thorel, qui a expérimenté le plan de travail en CP, dans la continuité de la maternelle où l’on travaille déjà par atelier, parfois autonomes.

Lorsqu’une fiche était terminée, l’enfant l’indiquait de deux barres dans son plan de travail et déposait la fiche dans le bac à correction. Si elle n’était que commencée, il l’indiquait par une barre. C’est un temps où chacun s’exerçait, tout seul. « Avec une discipline de fer », précisa monsieur Thorel, « discipline que chacun accepte parce qu’il apprécie de travailler tout seul et librement ». Comme toujours dans la pédagogie Freinet, chacun avançait à son rythme, de manière très modulée. Pendant ces plages de travail individuel régulées par le plan de travail, les enfants pouvaient s’entraider, sauf pendant les évaluations. A la fin de la journée, les cases se remplissaient, visiblement le travail avançait. Une fois par semaine, le conseil de coopérative permettait de faire le bilan sur le travail, le plan de travail représentant un contrat. Ce contrat pouvait être alors renégocié.

Pour les nouvelles du matin comme pour le plan de travail, l’important est donc d’avancer dans la réflexion, dans les apprentissages, dans l’autonomie. On avance toujours mieux lorsque l’on l’est motivé. Et Danielle et Marcel Thorel de rappeler quelques secrets de la motivation : savoir à quoi sert ce que l’on fait, pouvoir choisir ce que l’on va faire, avoir le sentiment de devenir compétent, avec des tâches ni trop faciles, ni trop difficiles à réaliser et, enfin, faire partie d’un collectif sécurisant. Sans doute en saurons-nous davantage, puisque Danielle et Marcel Thorel ont accepté de continuer d’accompagner l’école d’Esquerchin sur la route des classes coopératives.

Christine Vallin, inspectrice de l’éducation nationale

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Apprendre, cela s’apprend

Lundi 11 octobre, Jean-Michel Zakhartchouk, professeur honoraire en réseau d’éducation prioritaire et rédacteur aux Cahiers pédagogiques, est intervenu à Auby, devant soixante enseignants du premier et second degré. Le sujet ? Apprendre à apprendre.

jmzJean-Michel Zakhartchouk rappelle un axe directeur dans l’aide : il s’agit de prévoir dès le début le fait que les élèves auront à s’en passer, ou à être moins aidé. Un autre axe : le climat de la classe devra permettre aux élèves de se tromper et d’apprendre à ne pas réussir tout de suite et à chercher. Il ne s’agit pas de supprimer les difficultés, mais d’apprendre aux élèves à les affronter. Mais qu’est-ce qui va les aider ?

 

L’attention, c’est vital

Tout d’abord, chacun aura à s’approcher de la manière dont il s’y prend pour apprendre, et d’entendre d’autres manières, peut-être plus efficaces : « Se connaître, c’est utile. Savoir comment on apprend le mieux, c’est utile. »
Ensuite, il sera important de travailler sur l’attention : la dispersion est un ennemi. Pour autant, dire « faites attention ! » est inutile et même contreproductif si l’enfant met toute son attention… à être attentif ! Il conviendra alors de guider, de dire à quoi il faut être attentif, de repérer aussi les moments forts où il est bon d’être particulièrement attentif, comme au moment de la consigne.
Vient le problème de la mémorisation. Et Jean-Michel Zakhartchouk de préciser : « On sait aujourd’hui que la mémoire n’est ni un enregistreur, ni un appareil photo. Regarder ou entendre quelque chose ne suffit pas du tout à retenir. De même, la mémoire à court terme permet de retenir et réussir, mais seulement dans l’immédiateté. Il faut viser la mémorisation durable. Y revenir donc, plus tard. » Il faudra donc créer des liens entre diverses informations pour pouvoir les retrouver plus facilement dans sa mémoire à long terme.

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Dessin de Jack Koch pour le dossier « Neurosciences » des Cahiers pédagogiques

On sait aussi que ce qui se joue autour de la consigne est central : comprendre la consigne, ce n’est pas seulement comprendre les mots : « C’est essayer de comprendre pourquoi le prof a demandé telle chose et transformer donc les élèves en stratège. Faire reformuler, expliquer la consigne, chercher à déjouer les pièges, c’est investir sur la durée. » Posez donc ce problème à vos élèves ou à vos enfants : « Un poteau mesure un mètre à une heure. Quelle sera sa taille à quatre heures ? » vous serez surpris…

Moins d’efforts pour plus d’effet

Jean-Michel Zakhartchouk rappelle nécessaire de trouver la bonne vitesse : plus on donne du temps, plus cela risque de prendre du temps. S’entrainer alors parfois en temps limité. Et savoir à d’autres moments prendre le temps. Pour qu’ils aillent vite et au bon endroit, il est indispensable d’apprendre aux élèves à trier l’information, à chercher la source fiable en engageant à la méfiance et à la réflexion : « Des éléments décisifs pour développer l’esprit critique sur les réseaux. »
Reformuler est à la base de la compréhension, en user et abuser. Quant à la copie, il sera bon d’en faire un exercice habité, dans lequel l’élève s’investit, cherche à comprendre et ne fait pas qu’écrire mécaniquement. Se relire, s’autocorriger et puis s’exprimer à l’oral, devant les autres sont aussi des compétences utiles pour apprendre.

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Après le temps de la conférence, est venu un temps de travail en groupes, puis un temps de questions à l’intervenant : quid du travail à la maison ? Et Jean-Michel Zakhartchouk de rappeler que e n’est pas en supprimant une difficulté qu’on la résout : « Pour qu’il ne renforce pas l’échec, il faut que le travail soit préparé en classe et avec les parents, en les aidant concrètement à aider leur enfant (« quand il apprend une phrase, il la dit dans sa tête »). » La méthodologie pour apprendre, mais quand ? « Ne pas la considérer comme un à-côté, mais comme à la base du travail impliqué des élèves. L’intégrer, donc dans les activités, faire par exemple écrire des questions sur le texte à un élève. »

Cette formation fut un premier temps autour d’apprendre à apprendre. D’autres moments devraient jalonner l’année, dans le premier et dans le second degré, comme une passerelle entre les deux rives.

Christine Vallin

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Apprendre à négocier, pour mieux vivre ensemble

Lundi 10 octobre 2016, a eu lieu une formation intitulée « Gestion de conflits ». Qu’est-ce qui se cache derrière cet intitulé ? De quelles manières peut-on aider les élèves à éviter l’escalade qui mène à la violence ? C’est ce qu’ont expliqué François Ghoris, formateur OCCE, et Caroline Lamoot, administratrice OCCE, à un groupe de directrices et directeurs d’écoles de la circonscription de Douai Cuincy.

Francois Ghoris et Caroline Lamoot

Francois Ghoris et Caroline Lamoot

L’OCCE, Office central de la coopération à l’école, est une association bien placée pour former ainsi sur le thème de la gestion des conflits. En effet, si l’on coopère, le conflit pointera son nez à un moment ou à un autre. Parce que, comme l’a rappelé François Ghoris, aller vers l’autre se dit « ad gressere », agresser. Ce n’est donc pas tant le conflit que l’on va chercher à éviter, puisqu’il est inévitable dans tout groupe en marche, mais sa résolution par une autre modalité que la violence. Si le conflit fait progresser un groupe, une société, la violence sera toujours une souffrance imposée à l’autre.

Comment réagit-on aux situations de conflit ? François Ghorgis et l’OCCE discernent quatre réactions possibles : en le contournant, par la fuite ou la douceur ; ou en l’affrontant, par la force ou la négociation. Chacun fait comme il le peut, comme il sait le faire, en fonction de la manière dont il a été élevé, de ce qu’il a vécu. « La solution éducative et constructive, c’est la négociation. Et les outils de négociation que l’on transmet aux enfants sont parfois racontés le soir aux parents. Tout le monde avance ! », précise François Ghoris.

Des outils pour négocier

Mais comment faire ? D’abord, mettre en place différentes modalités de prévention. Laissons de la place aux émotions, positives ou négatives, puisqu’un besoin non satisfait engendre une émotion, et du conflit. Il est donc bon d’aider les gens à formuler les choses, à expliquer ce qui se cache derrière un affect. Ensuite, ce qui crée de conflit, en premier lieu c’est de croire que l’autre est pareil que soi. Il convient plutôt de chercher la différence et de voir ensuite de quelles manières nous pouvons être complémentaires. Reste aussi à donner des outils aux enfants pour qu’ils entrent dans la négociation. Caroline Lamoot en présente : « Par le message clair, l’enfant dit à l’autre ce qu’il a vécu, son émotion, et il termine par « est-ce que tu m’as compris ? » On peut aussi former des médiateurs enfants (qui reformulent les prises de parole, qui demandent s’il y a une solution proposée, si l’un et l’autre sont d’accord), ou installer un banc de la médiation, une trace écrite anonyme de médiation. »

Document OCCE

Document OCCE

Une chose ressort de cet après-midi de formation et de réflexion des directrices et directeurs d’écoles : si l’on s’est placé en situation de confrontation à des situations de conflit, en devenant directeur, ou en étant enseignant, c’est peut-être parce que l’on se retrouve en mesure d’aider les autres à gérer leurs conflits. Ne pas subir le conflit, et  pouvoir donner aux autres les moyens d’agir. Aider ceux qui sont autour de soi, au fond, à mieux vivre ensemble.

Christine Vallin

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Faumont, à l’école du numérique

Lundi 12 septembre 2016, a eu lieu une inauguration remarquée à l’école de Faumont : l’inauguration de l’équipement numérique, écran numérique interactif, tablettes et accès à internet. L’aboutissement d’un parcours opiniâtre de la municipalité, soutenant un désir de l’équipe enseignante d’entrer dans l’école numérique.

Monsieur Coquelle et madame Hays

Monsieur Coquelle, maire, et madame Hays, adjointe aux écoles

Aux côtés de monsieur Coquelle, maire de Faumont, et de madame Hays, adjointe aux écoles, la présence de monsieur Lazaro, député, de madame Quatreboeufs, conseillère départementale, mais aussi de monsieur le Vice-président de la Communauté d’agglomération du Douaisis soulignait un engagement fort pour faire entrer plus avant les écoles dans le numérique. Équiper une école de matériel numérique n’est pas anodin. C’est un investissement financier, un projet qui demande d’aller voir ce qui se pratique ailleurs. C’est une collaboration, émaillée d’échanges avec les enseignants pour connaître leurs projets. C’est aussi un pari, que l’on se donne en réfléchissant à ce que l’on veut en faire, en croyant aux élèves d’aujourd’hui et en ayant une idée des citoyens qu’ils deviendront demain. La municipalité de Faumont a suivi toutes ces étapes.

Un écran numérique interactif et une classe mobile équiperont désormais l’école. Un écran numérique interactif est un grand écran tactile, sur lequel on pourra écrire et dessiner, faire une recherche sur internet et afficher une carte de France, y situer Faumont ou les Etats Unis. Et la classe mobile ? Rangée dans sa valise, elle se déplacera dans les salles, pour un travail sur tablettes à partir d’applications éducatives.

MatérielCe matériel sera donc pluriel. On pourra l’utiliser avec les plus petits comme avec les plus grands, grâce à la classe mobile de tablettes. Il permettra à des élèves ayant un handicap moteur de faciliter le geste d’écrire. Il s’adaptera au travail en classe entière, en groupes, jusqu’à un travail individuel.

Il permettra aussi de s’ouvrir sur le temps et l’espace. Les élèves continueront chez eux une rédaction d’article ou autre chose, ils entreront en contact avec d’autres élèves, à l’autre bout du monde ou avec les écoles et le collège de secteur. Ils y apprendront les bonnes habitudes de communication avec les autres, comme l’esprit critique, rempart devant les risques d’une information qui circule à flot. Ce sera aussi un nouveau moyen de communiquer avec les parents.

Mais ce matériel invite aussi à coopérer pour apprendre, lors d’un travail de groupe, d’une recherche, d’un échange. L’entraide, la solidarité, le travail collaboratif sont des manières de vivre qui se transmettent en se pratiquant. Ce sont des éléments importants d’une école où il fait bon vivre, d’une société dans laquelle il fait bon grandir.

Parents et enseignants assistant à la démonstration

Parents et enseignants assistant à la démonstration

Et ce qui vaut pour les élèves vaut pour les enseignants : lorsqu’ils font travailler leur classe avec d’autres classes, les enseignants travaillent naturellement avec d’autres enseignants, ils développent des réseaux professionnels, se forment et se transforment. Si l’on en croit un rapport paru très récemment, le travail collaboratif est un des éléments qui renforcent le sentiment d’efficacité professionnelle et de bien-être au travail.

Pour les bénéfices à venir, un grand merci à la commune de Faumont et à ses partenaires, et aux enseignants qui vont inventer maintenant d’autres voies pour faire apprendre, dans une école qui change.

Christine Vallin, inspectrice de l’éducation nationale

Recommencements

grille écoleOn la sentait frémir depuis deux semaines. On la devinait se préparer en coulisses, autant chez les enseignants avec leurs nouveaux programmes que dans les familles avec cahiers et cartables. Et voilà l’année lancée.

Que lance-t-on lorsqu’on lance une année ? On lance d’abord les conditions de fonctionnement de toute l’école et de toutes les écoles. Sur la circonscription de Douai-Cuincy, une trentaine de directrices et directeurs se sont réunis pour connaitre les grandes orientations de l’année, puis chacun a réuni l’équipe d’enseignants, rencontré les personnels. Si la priorité de la sécurité des élèves et des personnels a toujours été présente, cette année elle est plus vibrante, chargée des images de l’été et des mois qui ont précédé. Alors, partout, on anticipe, on adapte, sans perdre de vue pourtant la chaleur de l’accueil et la sérénité des enfants. Dans les mois qui viennent, les échanges avec les services de l’état, les municipalités, la police et la gendarmerie vont se poursuivre.

Travaux de classe 1Que lance-t-on encore ? On relance trois objectifs de l’enseignement qui flottaient encore dans l’air des classes : apprendre, comprendre et raisonner. Cette année, plus encore peut-être que les autres années, aux côtés de la transmission et de la culture des savoirs, des savoir-faire et des savoir-être, on ne perdra jamais de vue l’importance de donner aux enfants les clés pour réfléchir et pour trouver leur chemin dans les flux d’images, d’informations et de mots d’ordre parfois séduisants et simplistes. Le tout sur fond de nouveaux programmes scolaires, que chacun va s’approprier.

Que lance-t-on enfin ? Eh bien tout ce qui accompagne les visages des enfants lorsqu’ils entrent dans la classe : le groupe où l’on va apprendre à vivre ensemble et à gérer les désaccords ensemble, les projets pédagogiques des années précédentes et les nouveaux projets qui fleurissent comme des printemps.

Fonctionnement et sécurité des écoles, enseignements, projets pédagogiques : tout cela sera l’objet d’un travail d’équipes de la part des deux cent cinquante enseignants et directeurs de la circonscription, qui échangeront encore un peu plus avec les enseignants des collèges. Un travail collectif toujours renouvelé. Un travail de coopération toujours à inventer.

Christine Vallin

Inspectrice de l’éducation nationale

Flines-lez-Râches : une école en couleurs

Depuis quelques semaines, les élèves et l’équipe enseignante de l’école Gérard Philipe de Flines-lez-Râches travaillent dans une toute nouvelle école, inaugurée le 31 mars 2016. Un remarquable projet qui arrive à son terme, grâce à l’engagement de la municipalité et de madame Goupil, maire de la commune, ainsi que des services de l’Etat.

La salle de sport - Photo : madame MateufLa salle de sport – Photo : madame Mateuf

Il est 8h30. Deux petits yeux endormis entrent dans la classe, tenant la main de papa et l’oreille de doudou. La maitresse est là, elle dit « Bonjour, comment ça va Mehdi ? ». Elle est toujours là, la maitresse. A se demander si elle ne dort pas dans l’école. Les petits yeux endormis marchent à pas raccourcis vers la construction commencée la veille, un château rouge avec une tour plus haute que les nuages.

Dans la classe de madame Hoël - Photo : madame MateufDans la classe de madame Hoël – Photo : madame Mateuf

C’est ainsi que, deux ou trois fois par semaine, lorsque l’on est Inspecteur de l’éducation nationale, on se retrouve ainsi aux premières loges d’une histoire qui commence toujours aujourd’hui, où l’on observe l’habileté des professeurs des écoles à faire grandir, et leur ingéniosité pour que naissent les apprentissages. Où l’on voit comment les enfants vont au langage et comment le langage vient aux enfants, comment les nombres apparaissent sur les doigts et comment les doigts montrent les nombres, comment on apprendre à vivre avec l’autre et comment l’autre vous le rend bien.

De la cour au carré potager - Photo : Madame MateufDe la cour au carré potager – Photo : Madame Mateuf

A Flines-lez-Râches, ce nouveau bâtiment, coloré, lumineux, c’est l’endroit idéal pour que vive cette école que les enseignants travaillent chaque jour à rendre exigeante, plus juste, inclusive. Et partenariale. C’est pour ce partenariat entre la mairie, les services de l’Etat, les collectivités territoriales et tous ceux qui ont oeuvré à ce projet, que l’Education nationale remercie chaleureusement chacun.

Solidaires pour réussir

Accueillir des élèves, cela demande de leur donner une place. Une place pour apprendre, une place pour grandir. Une place pour soi, une place parmi les autres. Une place pour les enfants, une place pour les parents aussi. A l’école Pont-de-la-Deûle de Flers-en-Escrebieux, l’équipe éducative fait en sorte que chacun trouve cette place.

Groupes de lecture Flers pont 2Caroline Lamoot, la directrice, fait sa dix-neuvième rentrée dans l’école. « On est tellement bien, ici… C’est une école où les gens sont solidaires. » Elle a commencé sa carrière à l’école des Bateliers de Douai, dans une formation sur le terrain : « Très dur, mais très formateur pour des débuts… » Puis elle est entrée à l’école normale, passé le CAPSAIS, le Certificat d’aptitude professionnelle pour les aides spécialisées. Puis est venue l’école de Flers Pont-de-la-Deûle.

Caroline Lamoot est une femme de conviction, dans une équipe de conviction : « Les enfants qui pensent qu’ils n’y arriveront jamais, dans l’équipe nous sommes là pour leur prouver le contraire. L’esprit de groupe se construit sur cette entraide. » Et l’entraide demande une rencontre.

 

 

Une rencontre pour lire

Cette année, tout a commencé après les vacances de la Toussaint : « Bientôt, nous allons faire des groupes de lecture. » Depuis, une fois par semaine les enfants d’Ulis (Unités localisées pour l’inclusion scolaire), d’IME (Institut médico-éducatif) et les élèves de CP, CE1, CE2 se retrouvent et lisent. Certains sont déjà de bons lecteurs, d’autres sont encore non-lecteurs. Ensemble, on écoute l’histoire et on lit, on s’écoute et on s’entend bien. Même si l’on n’est pas pareil, même si l’on a six ou dix ans.

Groupes de lecture Flers pont 4En CP, on est allé à Paris. Les enfants racontent chacun à leur tour : « Le loup qui voulait faire le tour du monde a vu la Tour Eiffel qui avait des ailes. », « A Londres, il a pris le thé avec la reine d’Angleterre ! », « En Italie il s’est promené sur une gondole, et puis… » et puis la suite, ce sera pour la semaine prochaine.

On travaille le lexique et le son. A chaque période, les enseignants font un bilan pour savoir si des élèves peuvent changer de groupe. C’est la quatrième année qu’ont lieu les groupes de lecture. Cela demande une grosse organisation, de prévoir les lieux, les groupes, le matériel. On lance, et puis cela avance ensuite. « Le plus gros bénéfice est pour les élèves le plus en difficulté, pour les élèves handicapés. Mais chacun y trouve un avantage. », précise Caroline Lamoot.

 

L’esprit d’entraide

Groupes de lecture Flers Pont 1Les groupes de lecture ne sont pas la seule occasion de faire travailler les élèves d’IME et d’Ulis avec les autres classes, puisqu’ils se retrouvent aussi en chorale en cycle 3, ou en sport. En sport, les plus grands, ceux qui vont partir en collège, ont même encadré des ateliers. En chorale, tous apprennent par cœur ce que certains ont le plus grand mal à écrire. Et puis en anglais, on commence les rapprochements.

Une fois par mois, ont lieu des conseils d’enfants : les grands y prennent des notes, les conflits de classe se règleront plus tard, en se parlant. Les souhaits par classe sont présentés et l’on voit comment faire pour les réaliser lorsque c’est possible, écrire à Monsieur le Maire, aux parents d’élèves. Ils ont même écrit au Président de la République… Et ils ont reçu une réponse ! Alors à l’école de Pont-de-la-Deûle, on sait que l’esprit d’entraide, ça rend possible l’impossible.

Christine Vallin, Inspectrice de l’éducation nationale

L’Histoire : le vase ou le feu

Bernard Malczyk

Bernard Malczyk

Donnez à Bernard Malczyk un public de cent cinquante professeurs des écoles. Demandez-lui de leur transmettre ses secrets pour la préparation et la présentation d’une séquence d’Histoire. Sur la Première guerre mondiale, tenez. Ou sur la ville au Moyen Age. Bernard Malczyk réussit à merveille à transmettre les ressorts de l’intérêt de ces sujets à ses spectateurs.

Comment ? En racontant d’abord des histoires avec drôlerie. Des histoires surprenantes, mais toujours réelles, dans lesquelles les faits des gens ont traversé la grande Histoire. En choisissant les bons supports ensuite : peintures d’Otto Dix, photos, lettres, les entrées font plonger dans la vie des soldats ou des femmes restées aux champs. La vie… Car l’Histoire n’est pas un ensemble de dates et de statistiques, ou un pourquoi dont les causes restent obscures, trop complexes. Non, l’Histoire n’est pas hors de portée : on la touche du bout des mots et des photos et elle nous touche en ce qu’elle relie des personnes prises dans des évènements, des personnes qui font ces évènements. L’Histoire, c’est aussi ce qui relie ces évènements sur la ligne du temps et que l’on montre aux élèves, à partir desquels ils se repèrent. Grands-parents, parents, enfants : chacun sa « bande de vie », sachant que pour l’enfant tout est clair, « la bande de vie de grand-mère est plus grande que celle de maman, et beaucoup plus grande que la mienne. »

Quid des très longues leçons d’Histoire, des listes de dates, dont les plus anciens se souviennent, d’ailleurs ? « On a effrayé des générations d’élèves avec une telle approche. Cette approche fonctionne mal même avec les bons élèves. », avance Bernard Malczyk. Si les connaissances sont et seront toujours présentes dans les programmes et dans les classes, elles auront pour objectif de caractériser une époque, de comprendre un contexte. Faire des liens donc et rapprocher La Joconde de Léonard de Vinci, et Léonard de Vinci de la Renaissance, voilà qui fait le portrait d’une époque.

Les enseignants de la circonscription

La Renaissance… « Eduquer ce n’est pas remplir un vase, c’est allumer un feu. » : cette phrase rapportée par Bernard Malczyk sonne comme la « tête bien faite plutôt que bien pleine » de Montaigne et l’honnête homme qu’il décrit. Elle illustre tout à fait la manière dont Bernard Malczyk entend et conseille l’enseignement de l’Histoire. Et lors de la conférence, c’est bien aussi un feu qu’il a allumé chez les spectateurs.

Christine Vallin
Inspectrice de l’éducation nationale