Roland Charnay et la résolution de problèmes

Mercredi 26 septembre, le cinéma Majestic de Douai accueillait Roland Charnay pour une conférence sur la résolution de problèmes destinée à quelques 250 enseignants de cycle 3.

Est-il besoin de présenter Roland Charnay ?  Ce formateur, didacticien des mathématiques est le père d’ERMEL et de Cap Maths. Il a contribué à de nombreux ouvrages toujours utilisés par les enseignants.

 

Dans un premier temps, il rappelle les enjeux au travers des programmes du cycle 3. La résolution de problèmes est le critère principal de la maitrise des connaissances, c’est aussi un moyen d’en assurer une appropriation qui en garantit le sens et, il est nécessaire de proposer aux élèves des problèmes pour chercher.

Roland Charnay fait un détour par les évaluations nationales et internationales en s’attachant particulièrement à PISA. « On fait dire aux résultats des évaluations ce qu’on veut bien leur faire dire… »

Tout d’abord, il rassure les enseignants puisqu’il rappelle que la France est dans la moyenne des pays de l’OCDE. Dans une analyse plus fine des résultats, il faudrait tenir compte des aspects multifactoriels : ne pas se limiter aux contenus, prendre en compte le tissu social, avoir tendance à trop faire porter la responsabilité sur les enseignants ou sur les méthodes.

Roland Charnay pousse plus loin son analyse au travers de trois préoccupations. Tout d’abord celle concernant les élèves en difficulté : il y en a de plus en plus, l’écart entre « bons » élèves et élèves en difficulté augmente. Puis celle relative au rapport des élèves face aux tâches mathématiques qui montre un manque de confiance en soi, un manque de persévérance et une anxiété face à l’évaluation. Enfin, à celle des connaissances peu disponibles chez les élèves. Et, en fonction du point de vue des connaissances, des mathématiques appliquées ou des mathématiques formelles, les résultats sont bien différents (6e, 18e ou 27e). De quoi rassurer les enseignants présents.

Dans un deuxième temps, il étaye ses propos par des exemples concrets. L’analyse de cette erreur peut être de plusieurs ordres : problème de lecture, de stratégie, lié au sens des opérations, de pièges ou encore d’un calcul mental déficient. Mais Roland Charnay pousse plus loin l’analyse de cette erreur : il y a une certaine cohérence dans cette résolution fausse puisque l’élève a identifié deux étapes du problème (chercher le prix du tout et déduire le prix du dictionnaire). Il faut donc rechercher les causes de l’erreur. Sans doute l’élève n’aura utilisé que les nombres écrits en chiffres et il est aussi influencé par des inducteurs (« chaque » induit la multiplication). Ce sont des habitudes de résolution qui l’ont conduit à se tromper. Cela interroge évidemment les pratiques des enseignants. D’autres exemples conduisent à un constat montrant la nécessité d’un apprentissage organisé de la résolution de problèmes.Ce schéma d’analyse montre la difficulté pour l’élève qui doit toujours être en équilibre entre ces deux blocs et mobiliser un nombre important de connaissances et de compétences pour résoudre. Le rôle de l’enseignant est primordial : il doit redonner du sens au « cahier de brouillon », parfois poser la question en début d’énoncé et ainsi, conduire l’élève sur un chemin sur lequel l’erreur peut être une chance qui le mènera à mieux comprendre.

Roland Charnay rappelle aussi l’importance du calcul mental, notamment dans la résolution de problèmes de proportionnalité.

La deuxième partie de son propos aborde des pistes pour « apprendre à chercher et à résoudre ». Il attire l’attention sur le double sens du mot chercher en s’appuyant, avec une certaine malice, sur des expériences vécues en classe et dans lesquelles les enseignants se reconnaissent facilement.

  • Ne pas confondre lecture d’énoncé et résolution
  • Proposer plusieurs supports de présentation (situation réelle ou représentée par un dessin, un schéma…, communiquer oralement ou par écrit)
  • A partir des erreurs, faire argumenter sur la vraisemblance des réponses et sur les raisonnements et mettre en conflit avec la réalité
  • Illustrer par l’expérience
  • Manipuler pour apprendre mais sous certaines conditions (on peut manipuler pour valider par exemple)
  • Ne pas lier systématiquement les problèmes aux apprentissages en cours
  • Eviter les aides de surface (certains mots inducteurs guident mécaniquement les élèves)
  • Exploiter la diversité des procédures (les favoriser, les exploiter pour aider à progresser vers des solutions expertes)
  • Préférer une mise en commun plutôt qu’une correction
  • Permettre à l’élève de progresser par une mise en lien de résolutions et un choix de variables pertinentes

Chacune de ces pistes est illustrée de façon concrète par des exemples, des situations vraies. C’est rassurant pour certains enseignants, plus complexe pour d’autres mais le mérite de Roland Charnay est d’avoir ouvert ces pistes.

Pour terminer, Roland Charnay présente une progression sur la proportionnalité pour le cycle 3 et le cycle 4 rappelant ainsi ce qui est attendu au CM puis au collège. Ne nous précipitons pas !

La conférence s’achève sous les applaudissements des enseignants. Ce temps de formation aura permis de réactiver certaines notions pour quelques-uns, de mieux comprendre les réponses des élèves, de mieux analyser, d’exploiter plus finement. Il aura surtout permis à d’autres de mieux appréhender la résolution de problèmes grâce au regard expert de Roland Charnay. Et maintenant, osez !

Géry Brier
Conseiller pédagogique

NB : Pour ceux qui souhaitent poursuivre ce temps de formation, vous pouvez vous plonger dans le dernier ouvrage de Roland Charnay paru en 2018.